Plus de prêt, plus de cédule hypothécaire ?

En ville comme à la campagne, les relations de voisinage pimentent parfois la vie quotidienne. Quelques exemples.

Mon voisin a un pommier qui dépasse sur ma propriété. Puis-je cueillir les pommes?

Mon voisin était, à l’époque, propriétaire d’une colline. Au fil du temps, il a morcelé sa parcelle. Il en a donné une à chacun de ses fils et a vendu les autres. Il a gardé celle qui culmine au sommet de la colline. Pour l’accès à sa parcelle, il bénéficie d’une servitude de passage, inscrite au Registre foncier, sur les parcelles de ses fils. Mais il s’agit d’un escalier avec de nombreuses marches et d’un sentier en lacets. Il a donc décidé de construire un accès plus commode, lui permettant d’arriver devant sa porte avec sa voiture.

Cette nouvelle route passe à travers les parcelles qu’il a vendues. Le hic, c’est qu’il prétend avoir obtenu l’accord de ses voisins, ce qu’ils contestent — en tout cas, rien n’a été écrit — et il ne bénéficie pas d’une servitude. Il faut savoir que, en droit, un propriétaire d’une parcelle dépourvue d’accès, donc enclavée, peut, en principe, réclamer à ses voisins un droit appelé de «passage nécessaire ». Mais s’il a lui-même provoqué cette situation en vendant des parcelles sans prévoir une servitude en sa faveur et qu’il lui reste la possibilité d’utiliser un chemin, même moins pratique, il est alors déchu de son droit et ne peut plus rien exiger de ses voisins.

Reste la négociation. Autre exemple. Mon voisin a un pommier dont les branches dépassent la limite de sa propriété. Puis-je cueillir les pommes ? Comme voisin, vous pouvez, lorsqu’un arbre avance sur votre propriété, cueillir ou ramasser les fruits et les fleurs se trouvant de votre côté de la limite de propriété. Vous pourriez aussi exiger que les branches et les racines qui avancent sur votre terrain et qui endommagent votre propriété, soient taillées et coupées. Il faudra cependant laisser à votre voisin un délai raisonnable pour le faire à la bonne saison. Néanmoins, certains arbres sont protégés… Encore un autre problème. J’aimerais construire une piscine dans mon jardin.

Le problème est que les canalisations qui desservent mon voisin en eau, en gaz et en électricité, traversent mon jardin en plein milieu et que ces canalisations font l’objet d’une servitude inscrite au Registre foncier. Que faire ? Il est possible de modifier le tracé des canalisations — ce que les juristes appellent une «modification de l’assiette de la servitude » — mais en préservant les droits de votre voisin à maintenir les canalisations. Tous les frais seront à votre charge. Un dernier cas. Vos voisins empruntent, depuis des lustres, un sentier traversant votre propriété. Aucune servitude n’est inscrite au Registre foncier. Si vous décidiez, un jour, de clôturer votre jardin, vous en auriez tout à fait le droit. Ce n’est pas un usage — même de longue durée — qui crée un droit en faveur de vos voisins. Ces derniers ne pourraient donc pas s’opposer à la pose d’une clôture.

Me Sandra Laydu Molinari

Me Sandra Laydu Molinari

notaire à Montreux (VD)

Ce qu’il faut retenir …

  • Les servitudes inscrites au Registre foncier ont « force de loi ».
  • Un certain nombre de règles s’appliquent aux relations de voisinage. Le domaine peut être complexe.
  • Le proverbe dit: « Choisir ses voisins est plus important que choisir sa maison. »